– Eh ben Marie, je ne pensais pas que tu viendrais me voir, c’est cool de ta part.
– Oh tu sais, je dois t’avouer que c’est complètement par hasard. Je passais par la. Tu tiens le coup ? C’est quoi ta stratégie ?
– Je ne sais pas trop, je réfléchis. Mon avocat me dit que j’en aurai pour trois ans max si je plaide coupable. Sinon, on va mettre en avant le fait que j’étais au mauvais endroit au mauvais moment. Statistiquement, j’ai une chance sur six de m’en sortir et je devrais pouvoir faire appel tous les ans.
– C’est vrai que t’as pas eu de bol sur ce coup… Bon, Olivier, faut que je file.
– Ah oui, c’était expéditif..
– Oui, désolée, j’ai peut être l’occasion de visiter un appart vers Saint-Michel mais il ne faut pas que je loupe le coche. Tiens moi au courant.
– Voilà, fais comme chez toi..n’hésite pas si tu as besoin de quoi que ce soit.
– Merci. Je ne savais pas que tu cherchais à acheter aussi. Enfin, je ne savais pas que tu en avais les moyens, sans vouloir te vexer évidemment.
– Oh ne t’inquiète pas, je sais bien que toute la place est au courant de mes récents déboires financiers. Mais, j’ai eu une grosse rentrée d’argent, assez inattendue, donc, comment dire, la roue a tourné.
– C’est ce que je constate.. Ben, c’est super, t’as de la chance.
– J’espère que le prix te convient.
– Oui…oui.
– J’espère que tu ne m’en veux pas, je me dis qu’il faut loger tout le monde à la même enseigne, tu comprends ? Si on commence à faire des prix aux amis, on ne s’en sort plus. Le business, tu comprends ?
– Pas de problème, je serai partie au matin.
– Ok, prends ton temps surtout. T’as appris pour Olivier ?
– Oui, je suis passée le voir en venant ici.
– Ah oui ? Et donc ?
– Trois ans max.
– T’étais au courant que Noémie avait construit un hôtel dans le quartier latin ?
– Oui, c’est incroyable, hein ? Il y a quelques mois, elle avait du mal à joindre les deux bouts.
– Tu sais ce que c’est sa grosse rentrée d’argent ?
– Ce n’est pas très clair, une histoire de loterie ou quelque chose dans le genre mais pour être tout à fait honnête, je ne suis pas sûr que ce soit vraiment légal.
– Ah oui, tu crois ? Ça ne m’étonnerait pas d’elle, remarque, elle ne suit pas toujours les règles et a tendance à appeler ça de la chance.
– En parlant de magouilles, tu sais que Pierre habite dans le coin maintenant ? Pas claire non plus comme histoire, un accord loufoque avec Laurent.
– Oui, je lui ai envoyé un message mais il ne répond pas.
– Tu lui as dit que j’étais là aussi ? Car je pensais faire le mort…
– Oui, je lui ai dit. Mais ne t’inquiète pas, il n’est pas très réactif. Tant mieux d’ailleurs, il a tendance à profiter de mon argent à chaque fois..
– Ah ça y est, mon train est annoncé voie 3, je file. C’est pas mal, Montpar’ depuis les travaux, hein ?
– Vous avez de très beaux locaux. Cela doit être très agréable de travailler sur les Champs.
– Disons que l’on est à proximité de beaucoup de choses mais il y a aussi énormément de touristes. Dans quel coin de Paris habitez-vous ?
– Rue Lecourbe, mais j’aurais aimé investir dans des quartiers plus prometteurs.
– Ah ! Notre but a tous ! Revenons à nos moutons. Nous avons étudié attentivement votre dossier et nous aimerions vraiment vous aider à trouver une solution.
– J’en suis ravie.
– Nous pensions notamment à différents produits mais nous aurions besoin de plus d’informations pour affiner les conditions du prêt. Afin d’avoir toutes les cartes en main, pourriez-vous nous indiquer votre salaire actuel ?
– Je gagne 20 000 francs.
– Je me suis dit que tu apprécierais une petite visite, Marie.
– ….
– C’était plus sympa de l’autre côté, hein ?
– Olivier…
– Ne t’inquiète pas, ça passe vite finalement
– Olivier…
– Bon, quelle est ta stratégie ?
– Mes deux gares contre ta carte « Vous êtes libéré de prison » ?
Par Mini 697
Mini 697 nous propose ici un texte à la forme originale puisqu’il n’est composé que de dialogues. C’est une façon fort bien trouvée de ne pas avoir à amener trop de détails au fil du texte, et de ne faire avancer l’intrigue qu’à petits pas, tout en maintenant un suspense certain car on comprend certaines choses mais pas tout, et on aimerait bien tenir le fin mot… Finalement, c’est une façon très originale et très maline de nous conter une partie de Monopoly, presque comme un polar, où il y aurait des magouilles, des emprisonnements, des retournements de situation… (je ne m’étais jamais rendu compte, à titre perso, que le Monopoly était un genre de Dallas tendance littérature noire !)
Je pense, Mini, qu’il pourrait être amusant de glisser dans ton texte davantage de référence au jeu. Tu sèmerais ainsi des indices, sans que ça soit explicite, mais qui renforcerait l’effet de chute à la fin, on se dirait « ah mais bon sang mais c’est bien sûr ! ». Par exemple, tu peux caser quelque part l’expression « les dés sont jetés » (ou pipés), ce qui n’est pas clairement le signe que l’on est dans un jeu, mais qui après coup, au regard du dénouement de ton texte, rajoutera un petit « effet » sympathique. Et tu peux aussi rajouter d’autres expressions au fil du texte (« jouer cartes sur table », pourquoi pas, etc…), ou d’autres allusions au vocabulaire du jeu, qui donnerait encore plus au lecteur le sentiment… d’avoir été joué, justement !
Ayant personnellement beaucoup de mal avec la dialogue…je suis admirative de voir un texte entièrement composé avec! Et j’ai compris qu’à la fin qu’il s’agissait du Monopoly… ce qui m’a incité à relire le texte pour mieux appréhender les allusions.
J’ai trouvé ça très chouette! J’ai été très surprise par la chute et j’ai également apprécié relire le texte en connaissant la supercherie. C’est très rythmé et ingénieux. J’ai juste été un peu « perdue » par moment, mais sûrement est ce le but et peut être suis je la seule. En tout cas, c’est très original
Non, j’ai aussi été un peu perdue, comme toi, Puccini. Mais je dirais « juste ce qu’il fallait », pour ne pas décrocher, et pour ne pas non plus deviner… J’ai été un peu perdue, mais avec le sentiment que c’était parce que je baignais dans une histoire complexe, noire, trouble, avec de multiples développements tentaculaires, et que donc c’était normal d’y être un peu perdue. Du coup, l’effet de chute m’a vraiment surprise et ravie.
Effectivement, en me relisant plusieurs fois je me demandais si certains passages ne demandaient pas à être retravaillés car trop « obscurs » et j’avais peur de perdre des lecteurs en route, voire qu’ils restent incompréhensibles à la seconde lecture…
Je trouve l’idée excellente, tant sur la forme que sur le fond! mais j’avoue avoir été un peu trop perdue dans le dialogue, je ne savais plus combien il y avait d’interlocuteurs, et j’ai cru qu’une scène avait lieu plusieurs semaines après..bref, concernant mon cerveau au ralenti, quelques petits indices éparpillés, ou précision sur les protagonistes m’auraient aider à apprécier à sa juste valeur ce texte original
J’adore l’idée du Monopoly (je suis même vexée de ne pas l’avoir eue :-p), la façon dont tu l’amènes avec les dialogues et je n’ai rien vu venir du tout avant la fin! Par contre, j’ai aussi eu un peu de mal à rester dedans à la 1ère lecture, j’essayais de comprendre les implications et les liens entre les différents personnages et je n’y arrivais pas. Je ne sais pas comment on pourrait rendre ca plus facile à comprendre / accrocher davantage le lecteur en première lecture mais ça vaut le coup de se pencher dessus car c’est un super texte original ;-)!
Une petite version 2 est donc visiblement attendue, par ici 😉
Je rejoins les autres commentaires ! J’ai été un peu perdue, n’ai pas compris tout de suite l’histoire du monopoly mais cela m’a permis de le relire et de saisir des choses plus fines que seule la première lecture ne pouvait me donner ! Du coup, cette redécouverte m’a enchantée !